Le Prix Bettencourt pour les jeunes chercheurs 2021 récompense Ahmad Yatim, post-doctorant en immunologie, pour ses recherches sur la résistance au SARS-CoV-2.

Les pseudo-engelures comme signe d'une immunité hors norme

Depuis le début de la pandémie de COVID-19, un nombre élevé de lésions inflammatoires des extrémités – ressemblant à des engelures – sont survenues. Cette recrudescence inhabituelle de cas de pseudo-engelures suggère un lien avec l’infection par le virus SARS-CoV-2. Étonnamment, malgré un contact rapproché avec une personne infectée, les personnes présentant des pseudo-engelures ne sont pas positives pour le SARS-CoV-2 et ne développent pas de symptômes du COVID-19. Aurait-il un lien entre les pseudo-engelures et une résistance à l’infection par le SARS-CoV-2 ?

Les formes sévères de COVID-19 semblent être liées à un défaut de la réponse immunitaire innée (c’est-à-dire indépendante de la production d’anticorps) dont le but est de ralentir la progression du virus afin de donner le temps nécessaire à la réponse immunitaire adaptative (anticorps) de se mettre en place. A l’inverse, une réponse innée très robuste pourrait éliminer rapidement d’elle-même le virus sans nécessiter la production d’anticorps. Ainsi, le lien entre les pseudo-engelures et une résistance à l’infection par le SARS-CoV-2 pourrait être la mise en place d’une immunité innée hors norme chez ces personnes, car ces lésions de la peau résultent d’une forte activité de l’interféron, un médiateur clé de la réponse innée antivirale.

Résistance au SARS-CoV-2 : la réponse pourrait se trouver dans nos gènes

L'objectif du projet qu'Ahmad Yatim développera dans le laboratoire de Jean-Laurent Casanova à l'Université Rockefeller, est de découvrir les bases génétiques et moléculaires de cette résistance au SARS-CoV-2 médiée par l'interféron. Son hypothèse est que des facteurs génétiques prédisposent ces personnes à mettre en place des défenses immunitaires naturelles exceptionnelles contre le SARS-CoV-2, ce qui les rend résistantes à l’infection.

Pour étudier cela, il constituera une cohorte internationale de personnes souffrant de pseudo-engelures après exposition au SARS-CoV-2 et séquencera leur génome afin d’identifier des changements dans des gènes pouvant expliquer cette résistance. Une fois que des gènes auront été identifiés chez les patients dits résistants, Ahmad Yatim mènera des expériences sur des cellules pour comprendre les mécanismes par lesquels ils influencent nos défenses antivirales.

Ahmad Yatim en quelques mots

Lors de sa thèse en biologie moléculaire et cellulaire sous la direction de Monsef Benkirane et Yves Levy à l’Institut de Génétique Humaine de Montpellier, Ahmad Yatim s’est intéressé à une voie de signalisation nécessaire au développement des lymphocytes T, des cellules présentes dans le sang qui jouent un rôle dans la réponse immunitaire. Cette voie, appelée Notch, est perturbée dans certains cancers qui touchent ces cellules, les leucémies aiguës lymphoblastiques.

Le travail d’Ahmad Yatim, récompensé par plusieurs prix scientifiques, a permis d’identifier des cibles thérapeutiques potentielles dans ces cancers.

Après sa thèse, en 2012, il entame des études en médecine à l’Université Paris-Est Créteil, puis se spécialise en dermatologie en Suisse.

Pendant son séjour post-doctoral à New York, Ahmad Yatim étudiera comment un intrigant signe cutané peut cacher un mécanisme de résistance à l’infection du virus SARS-CoV-2.

Prix Bettencourt pour les jeunes chercheurs

Créé en 1990, le Prix pour les jeunes chercheurs est l’une des premières initiatives de la Fondation Bettencourt Schueller. Jusqu'en 2021, ce prix était décerné chaque année à 14 jeunes docteurs en sciences ou docteurs en médecine, pour leur permettre de réaliser leur séjour post-doctoral dans les meilleurs laboratoires étrangers. 349 jeunes chercheurs ont été distingués. La dotation du prix était de 25 000 euros.

Tous les lauréats du prix