La reprogrammation cellulaire est un procédé qui permet de conférer à des cellules adultes différenciées les caractéristiques de cellules souches et qui permet ainsi d’augmenter la capacité de régénération de certains tissus. FabriceLavial cherche à élucider les mécanismes génétiques qui permettraient de garder les bénéfices de la reprogrammation cellulaire, tout en évitant le risque de développer un cancer. Comprendre et limiter ces risques serait une avancée considérable pour la médecine régénérative.
La promesse de la reprogrammation cellulaire
Pendant le développement, les cellules souches se différencient en cellules spécialisées, caractérisées par des programmes d'expression génique propres à chaque type de cellule. Ces identités sont censées rester stables au fil des divisions. Toutefois, il est possible d’ «effacer» la différenciation en utilisant 4 facteurs (Oct4, Sox2, Klf4 et c-Myc) qui vont agir sur l’expression des gènes et conférer à nouveau aux cellules les caractéristiques de cellules souches. Ce processus est appelé reprogrammation cellulaire. On peut donc imaginer prendre des cellules de la peau d’un patient, les reprogrammer pour obtenir des cellules souches, puis les programmer de nouveau en cellules de cerveau par exemple. Le potentiel thérapeutique de ce type de procédé est immense.
Le côté obscur de la reprogrammation
Ces grandes promesses thérapeutiques sont à prendre avec précaution. Des recherches restent encore nécessaires pour comprendre les mécanismes et les conséquences à long terme de la reprogrammation. En effet, lorsque la reprogrammation est réalisée chez l’animal (in vivo), en plus d’augmenter la capacité de régénération de certains tissus, elle est à l’origine de maladies où la multiplication des cellules est incontrôlée: les cancers. Par conséquent, malgré ses effets révolutionnaires, les mécanismes moléculaires déclenchés par la reprogrammation in vivo doivent être mieux compris pour éviter d'atteindre le point de non-retour où les cellules deviennent cancéreuses. Le processus de reprogrammation présente des similitudes avec le cancer, comme conférer aux cellules la capacité de s’autorenouveler et de résister au vieillissement et à la mort cellulaire. Cependant, les gènes impliqués dans ces deux processus n'ont été que très peu disséqués ou comparés, principalement en raison du manque d'outils génétiques dédiés. Pourtant, ces découvertes seront cruciales pour déchiffrer l'interaction entre la reprogrammation et le cancer, qui entraînent des conséquences diamétralement opposées.
Un mécanisme commun avec le développement de cancers
La dotation Impulscience va permettre à l’équipe de FabriceLavial de répondre à des questions essentielles avant d'envisager toute perspective thérapeutique utilisant la reprogrammation cellulaire. Il va ainsi comparer et étudier les profils d’expression génique de cellules reprogrammées et de cellules cancéreuses notamment dans le poumon. Ceci dévoilera le programme moléculaire qui permet aux cellules d’acquérir la capacité de se reprogrammer ainsi que de déterminer le point critique à ne pas dépasser pour ne pas devenir cancéreuses. L’originalité de ce programme de recherche est qu’il utilise des modèles de souris développés dans le laboratoire de FabriceLavial, qui permettent de contrôler finement à quel moment et dans quelles cellules la reprogrammation et la tumorigenèse vont être déclenchées. Ainsi l’équipe pourra créer une cartographie des évènements géniques et prédire les moments critiques. Les chercheurs pourront identifier les gènes à bloquer pour éviter aux cellules reprogrammées de passer du côté obscur et devenir cancéreuses.
Fabrice Lavial en quelques mots
FabriceLavial obtient son doctorat en 2008 à l’École Normale Supérieure de Lyon, au cours duquel il explore la fonction des gènes clés de la pluripotence, Oct4 et Nanog, dans le contexte du développement de l'embryon de poulet. Pendant son séjour post-doctoral à l'Imperial College de Londres, il étudie les fonctions de facteurs spécifiques dans les cellules souches et dans la reprogrammation chez l’embryon de mammifère. En 2014 il rejoint le Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon pour créer son laboratoire grâce à la dotation du programme ATIP-Avenir. Depuis, avec son équipe, il contribue au domaine de recherche de la reprogrammation cellulaire, avec plus récemment une ouverture sur la recherche contre le cancer.
Programme Impulscience
Impulscience attribue chaque année 7 nouveaux soutiens à des chercheuses et chercheurs en sciences de la vie. Concentré sur le milieu de carrière, ce programme a pour objectif de soutenir cette étape cruciale pour le développement des projets de recherche.