En 2014, la Fondation a choisi de devenir le mécène principal de la Villa Kujoyama à Kyoto, ouvrant alors cette résidence artistique française aux métiers d’art. Une décennie plus tard, une trentaine d’artisans d’art ont pu s’immerger de façon unique dans la culture japonaise, favorisant les liens entre les deux pays et le rayonnement des métiers d’art français en Asie.

La route qui mène à la Villa Kujoyama est étroite et sinueuse, mais la découverte en vaut la peine. Posée au sommet du mont Higashiyama, cette Villa est, aujourd’hui encore, l’unique résidence de créateurs français en Asie. Aménagée dans un somptueux bâtiment moderniste, elle surplombe en majesté la ville de Kyoto, berceau de toutes les pratiques artistiques japonaises depuis le XIVe siècle. S’ouvrir au monde de l’art et de l’artisanat japonais, telle est la mission de ce lieu dont l’idée remonte à 1926. L’écrivain Paul Claudel, alors ambassadeur de France au pays du Soleil levant, réfléchit à la création d’un institut culturel franco-nippon. La Villa ne verra finalement le jour qu’en 1992, bâtie par l’architecte Kuno Kato et inaugurée en 1994 avec une mission : accueillir en résidence artistes et créateurs qui souhaitent développer un projet en lien avec le Japon, dans les champs les plus variés de la création contemporaine. 

Trente ans plus tard, la Villa Kujoyama s’affirme comme l’une des plus prestigieuses résidences artistiques que la France administre à l’étranger. Elle est également considérée comme un précieux vecteur d’influence de la présence française au Japon et le symbole des échanges fertiles entre les deux pays.

Vue extérieure de la Villa Kujoyama © Kenryou Gu pour la Villa Kujoyama
Escaliers de la Villa Kujoyama. ©Kenryou Gu

Une immersion unique dans la culture et les savoir-faire japonais

En 2014, la Fondation Bettencourt Schueller a choisi de s’engager aux côtés de l’Institut français afin de soutenir ce lieu rare d’échange et de création, participant alors aux travaux de réhabilitation de la Villa et surtout, élargissant le programme des résidences aux métiers d’art et aux duos franco-japonais. En dix ans, une trentaine d’artisans d’art, parmi lesquels de nombreux lauréats du Prix pour l’Intelligence de la Main®, se sont relayés pour y suivre des programmes d’excellence, d’une durée comprise entre un et six mois. Véritables laboratoires d’accompagnement artistique, ces résidences sont l’occasion de tisser un compagnonnage avec les artistes également sur place (la Villa a tour à tour accueilli Georges Lavaudant, Emmanuel Carrère, Nathalie Azoulai…). Elles offrent surtout l’opportunité de vivre une immersion rare dans les savoir-faire japonais lors d’échanges avec des artistes, des enseignants d’écoles d’art et bien sûr les meilleurs artisans d’art, ces fameux « trésors nationaux vivants » détenteur d’un savoir-faire souvent très ancien, source d’inspiration unique pour les résidents.

Un lien continu entre techniques ancestrales et création contemporaine

En 2014, la doreuse Manuela Paul-Cavallier a travaillé à la Villa aux côtés d’un maître du Pavillon d’argent, l’un des grands temples bouddhistes de Kyoto. Celui-ci l’a initiée aux gestes et à l’harmonie de la calligraphie, lui permettant de renouveler en profondeur son travail sur la vibration des matières. En 2016, le designer François Azambourg a séjourné à la Villa pendant quatre mois durant lesquels il a travaillé avec les charpentiers locaux et confronté les pratiques nippones et occidentales, découvrant la modernité de l’artisanat japonais et son dialogue incessant avec la création contemporaine. Dans le même esprit, la styliste Aurore Thibout s’est formée au katazome et au yusen, deux techniques ancestrales de teinture sur soie et d’impression au pochoir qu’elle a exploitées de façon très moderne, tirant parti de leur dimension écologique et offrant un regard transversal franco-japonais puisqu’elle les a rapprochées de l’art de la dentelle de Calais.

Visite d'atelier à l'occasion des 10 ans de résidences métiers d'art à la Villa Kujoyama. © Lucille Pellerin

Une bulle de réflexion, d’observation, de méditation.  

En 2023, l’héliograveuse Fanny Boucher s’est à son tour rendue à Kyoto pour travailler sur le thème de la transparence par le biais des fusumas, les panneaux muraux peints et dorés à la feuille d’or qui, dans les temples, font office de séparation et de décor à la fois.

« J’ai eu le privilège de passer une journée entière avec maître Kunihiko Moriguchi, l’un des trésors nationaux vivants les plus renommés du pays. Nous avons évoqué les fusamas dans une dimension technique, mais surtout spirituelle avec cette conception du "vide qui n’est pas vide" (la philosophie du ma) et vient au contraire servir le motif. Cette rencontre a transformé ma façon de penser ma pratique. Plus largement, cette résidence a été pour moi une révélation. La possibilité d’arrêter le temps, de m’offrir une bulle de réflexion, d’observation, de méditation. Je suis repartie différente et l’expérience est aussi précieuse pour la suite de mon parcours, puisque je compte exploiter les liens tissés sur place pour développer la technique de l’héliogravure au Japon, où elle n’existe pas encore ».

Des échanges qui fonctionnement aussi dans une vraie réciprocité comme en témoignent Dimitry Hlinka et Nicolas Pinon, lauréats du Prix Liliane Bettencourt pour l’Intelligence de la Main® en 2023 et venus cet automne à Kyoto pour enrichir leur savoir-faire autour de la laque végétale.

« Nous avons le privilège de travailler avec Kenji Toki, chercheur à l’université de Sendai et grand spécialiste de la laque urushi, utilisée au Japon depuis des millénaires. Nous avons découvert avec lui des techniques inédites mais nous lui avons également fait connaitre l’usage de la poussière de chanvre, très précieuse pour la création de structures rigides. Notre séjour se prolonge désormais par la production d’une série de mobilier que nous allons présenter en 2025 à Paris, au salon Révélations ».

Un système pionnier d’accompagnement sur le temps long

Tirer le meilleur parti de l’expérience japonaise… C’est dans cet esprit que la Fondation a mis en place un accompagnement personnalisé de chaque résident, privilégiant le temps long pour renforcer l’impact du projet. Celui-ci intervient en amont du séjour pour le structurer. Il se prolonge ensuite pour aider les artisans d’art à exploiter au mieux l’expérience, qu’il s’agisse de l’organisation d’une d’exposition, de la refonte de leur atelier pour de nouveaux projets ou de la mise en relation avec des acteurs du monde de l’art ou de l’industrie. 

Ces initiatives se poursuivront au moins jusqu’en 2026 avec l’objectif d’accroitre encore le prestige de la Villa en France, au Japon et à l’étranger, d’encourager l’excellence des métiers d’art et de renforcer les synergies entre la Villa Kujoyama et la Villa Albertine, nouveau programme de résidence de la France aux États-Unis dont la Fondation est également mécène.

  • 139résidents depuis 2014
  • 73artisans d'art parmi eux
  • 12ans d'engagement (2014-2026)
  • 8ans de travaux financés

Pour célébrer les dix ans de ce mécénat, la Fondation a également choisi d’organiser à Paris, et en partenariat avec l’Institut français, un parcours découverte d’ateliers d’artisans d’art et une grande exposition conçue par la commissaire Alexandra Fau, qui réunit les œuvres réalisées au Japon par 16 artisans d’art en résidence à la Villa Kujoyama.

  • Discours d'Eva Nguyen Binh à l'Institut français pour les 10 ans de résidences métiers d'art à la Villa Kujoyama.
    © Lucille Pellerin
  • Performance à l'Institut français pour les 10 ans de résidences métiers d'art à la Villa Kujoyama.
    © Lucille Pellerin
  • Dans l'atelier de Mona Oren, sculptrice et cirière.
    © Lucille Pellerin
  • Visite de l'atelier de Mona Oren.
    © Lucile Pellerin
Institut français, 40 rue de la Folie Regnault 75011 Paris.
Visite sur rendez-vous.

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Villa Kujoyama

Lieu d’exception sur les hauteurs de Kyoto, la Villa Kujoyama se distingue tant par son interdisciplinarité, sa mise en dialogue des cultures et par son accompagnement personnalisé à l'égard des créateurs français et japonais qui...