Monsef Benkirane Comprendre la latence virale du VIH pour guérir le SIDA plutôt que le soigner
Monsef Benkirane, directeur de recherche CNRS au sein de l'Institut de Génétique Humaine de Montpellier
- 2013 • Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant
Monsef Benkirane traque le virus du VIH, caché dans des globules blancs en dormance, pour découvrir les moyens de l’éradiquer. Ses recherches ont permis de découvrir le premier marqueur du réservoir du VIH, et ouvrent la porte à des thérapies rétrovirales capables de guérir le SIDA.
Des limites de la trithérapie
En 2021, près de trente-huit millions de personnes dans le monde vivent avec le VIH, et près de 650 000 meurent encore de maladies liées au SIDA chaque année. Si la trithérapie a diminué considérablement le nombre de décès, pourquoi ne permet-elle pas de guérir du SIDA ?
Pour ceux qui y ont accès, le traitement doit être poursuivi à vie parce qu’en cas d’interruption, le virus, jamais tout à fait éliminé, rebondit invariablement. Ce rebond viral est possible car quelques cellules infectées par le VIH échappent à la trithérapie et à la vigilance du système immunitaire, on parle alors de latence virale.
Monsef Benkirane s’est donné pour mission de découvrir les marqueurs distinctifs des cellules dans lesquelles se cachent le VIH.
Où se cache le VIH ?
Tout au long de la trithérapie, le virus du SIDA se terre dans des globules blancs en dormance, dits quiescents : les lymphocytes T CD4. Le VIH passe alors sous le radar du système immunitaire et des traitements antirétroviraux, parce que ces cellules en dormance n’expriment pas de protéines virales.
Le seul moyen d’éradiquer complètement le VIH est donc de parvenir à détruire ces cellules infectées, mais encore faut-il parvenir à les détecter.
À l'Institut de génétique humaine de Montpellier, l’équipe de Monsef Benkirane cherche à identifier les marqueurs distinctifs du réservoir du VIH, pour permettre à de futurs traitements de traquer ces cellules chez les patients.
CD32a ou la découverte du premier marqueur du réservoir du VIH
En 2013, soutenus par la Fondation Bettencourt Schueller dans le cadre du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant, Monsef Benkirane et son équipe ont pu mener à bien un ambitieux projet : comparer les gènes exprimés par des lymphocytes T CD4 quiescents sains et des lymphocytes T CD4 infectés par le VIH.
En 2017, ils ont alors pu faire une découverte majeure, la protéine CD32a est surexprimée par les lymphocytes T CD4 quiescentes infectées.
Le marqueur CD32a permet de distinguer 80 % des cellules du réservoir du VIH, ce qui signifie qu’il faudra encore identifier d'autres marqueurs, pour espérer éradiquer complètement le virus.
Ces résultats promettent le développement de thérapies rétrovirales intervenant directement sur les cellules réservoir du VIH.
Monsef Benkirane en quelques mots
Virologiste moléculaire, Monsef Benkirane se focalise sur le VIH dès son doctorat. Il comprend que l’attachement du VIH aux globules blancs CD4 est déterminant pour l’infection, et montre que le virus détourne à son profit la machinerie de réplication cellulaire.
Postdoctorant au sein de l’Institut national de l’allergie et des maladies infectieuses des États-Unis, il publie des travaux pionniers sur les mécanismes d’activation des promoteurs viraux, séquences d’ADN nécessaires à la réplication des protéines du VIH.
En 1998, il constitue une équipe de recherche à l’Institut de génétique humaine de Montpellier, dédiée à l’étude des interactions entre VIH et cellule hôte.
La dotation du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant, obtenu en 2013, lui permet de mener à bien un ambitieux projet de recherche des marqueurs distinctifs des cellules du réservoir du VIH.
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1994 Doctorat en immunologie, Université d’Aix-Marseille
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1994 Post-doctorat au Molecular Virology laboratory, NIAID, NIH, Bethesda (États-Unis)
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1997 Chargé de recherche au CNRS, Institut de génétique humaine de Montpellier
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2007 Directeur de recherche de 1re classe au CNRS, responsable de l’équipe Virologie moléculaire à l’Institut de génétique humaine de Montpellier
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2010 Advanced Grant, European Research Council
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2013 Lauréat du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant
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2017 Son équipe découvre la protéine CD32a, qui permet de distinguer 80 % des cellules responsables de la latence virale du VIH.
Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant
Le Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant récompense chaque année un chercheur de moins de 45 ans pour l’excellence de ses travaux et sa contribution remarquable à son domaine de recherche scientifique. Ce prix est attribué selon les années à un chercheur établi en France ou travaillant dans un autre pays d'Europe. Vingt-sept lauréats ont été récompensés depuis 1997. A partir de 2023, la dotation de ce prix récompense personnellement le lauréat à hauteur de 100 000 euros.
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