Le 10 juillet prochain sera inaugurée la Cité internationale de la tapisserie à Aubusson. Plus qu’un simple musée, cet espace constitue un vaste équipement culturel et économique, qui valorise les savoir-faire rassemblés autour du fil et du tissage d’excellence mis en œuvre à Aubusson. Entretien avec Emmanuel Gérard, directeur de la Cité internationale de la tapisserie.

Quelle est l’ambition de cette toute nouvelle Cité internationale de la tapisserie ?

Emmanuel Gérard : Jusqu’en 2011, le musée de la tapisserie était régi par le Conseil général, puis il a été décidé que le Syndicat mixte de la tapisserie d’Aubusson serait chargé de développer et de promouvoir une Cité internationale de la tapisserie. Il s’agissait d’en faire un équipement culturel multifonctions en restructurant l’ancienne Ecole nationale d’art décoratif, dans le cadre d’un concours remporté par l’agence Terreneuve. C’est la raison pour laquelle différentes composantes gravitent autour d’un nouveau musée, socle fondateur de la Cité. L’inscription sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO en 2009 a donné un coût d’accélérateur.

Au-delà du musée, nous voulions faciliter la transmission des savoir-faire, développer la création contemporaine, créer un lieu de ressources et de promotion de la filière. Il s’agit donc à la fois de permettre la conservation de ce grand patrimoine de la France, mais aussi de promouvoir une dynamique économique dans un territoire rural sensible, la Creuse. Accompagner la filière tapisserie conduit également à valoriser un bassin de compétences connexes autour du fil et du tissage d’excellence.

  • Entrée de la Cité internationale de la tapisserie.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson
  • Artisan au travail à la Cité international de la tapisserie.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson
  • Tissage de l'atelier Françoise Vernaudon exposé à la Cité internationale de la tapisserie.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson
  • Projet d'un espace d'exposition pour la Cité internationale de la tapisserie.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson
  • Lissière en formation à la Cité internationale de la tapisserie.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson
  • "Panoramique polyphonique", un projet architectural tissé et sonore de Cécile Le Talec réalisé dans le cadre du Grand Prix – Appel à création contemporaine 2011.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson
  • Projet muséographique de l'espace appelé la Nef des tentures.
    © Cité internationale de la tapisserie à Aubusson

Plus qu’un musée, vous souhaitez faire de ce lieu un espace de création. Comment cela se concrétise-t-il ?

Depuis les origines, on observe que les périodes marquantes de la tapisserie d’Aubusson correspondent à des moments où celle-ci est en phase avec la création contemporaine. D’ailleurs même si la tapisserie continue d’être associée à une image ancienne, un peu « vieillotte », nous sommes entrés depuis 2010 dans une nouvelle ère de création.

Aujourd’hui les créateurs manifestent un regain d’intérêt pour l’expression textile. Les frontières entre arts plastiques, arts décoratifs et design sont aussi beaucoup plus perméables. Dès 2010, nous avons mis en place un fonds pour la création de tapisseries contemporaines, qui à travers six appels à projets, un par an, (le septième est en cours), a intéressé près de 1200 créateurs. Il a permis de produire des pièces étonnantes et très demandées qui participent à l’écriture de nouvelles pages de l’histoire de la tapisserie.

Nous espérons accueillir bientôt des artistes en résidence pour que la Cité devienne une plateforme de création contemporaine. Car notre idée, et notre tradition, est de toujours pratiquer « la tapisserie à quatre mains ». La conception est réalisée par un artiste, mais l’œuvre est le fruit d’un échange, d’une vision partagée avec un artisan qui en assure l’écriture tissée.

Le parcours d’exposition semble d’ailleurs être construit autour de l’humain…

En effet, c’est essentiel. Les espaces réalisés par les muséographes Paoletti et Rouland sont divisés en trois zones. La première permet de montrer l’utilisation de la technique du tissage en tapisserie à travers le monde, pour illustrer son universalité. La seconde, Les Mains d’Aubusson, favorise la compréhension de ces savoir-faire complexes et de leur mise en œuvre, qui sont profondément ancrés sur ce territoire. Dans pratiquement chaque famille, il y a eu une personne qui a travaillé dans le secteur de la tapisserie. C’est donc ici un savoir-faire très présent et vivant. Le troisième espace, la Nef des tentures, est une invitation à voyager, à rêver, au travers des cinq siècles et demi de production d’Aubusson. La tapisserie est un art monumental dans lequel il faut donner la possibilité au visiteur de s’immerger. Nous ne voulions pas imiter les musées de peinture, mais bien inviter chacun à ressentir le résultat étonnant de la collaboration entre l’artiste et l’artisan. Les 1200 m2 d’exposition sont complétés par des espaces d’exposition temporaire. De quoi nourrir la curiosité des 40 000 visiteurs que nous espérons accueillir chaque année.

Site de la Cité internationale de la tapisserie